Faute grave et congédiement : les normes du travail au Québec

Marie-Michelle Savard
Me Marie-Michelle Savard

Me Savard concentre sa pratique en litige civil, en droit du travail et de l’emploi ainsi qu'en droit administratif. Elle a également des habiletés en matière de droit de l'environnement et d'expropriation. Elle a conséquemment plaidé devant les instances judiciaires et administratives à de nombreuses occasions, devenant par le fait même une oratrice passionnée démontrant un fort sens de la persuasion.

La faute grave permet à un employeur de congédier un employé sans préavis. Nos avocats en droit du travail à Québec et Lévis vous définissent cette notion et vous expliquent dans quelles situations un employeur peut considérer qu’une faute grave a été commise par un employé.

Faute grave : le principe

Au Québec, la Loi sur les normes du travail prévoit qu’un employeur doit donner au salarié un avis de cessation d’emploi avant de le congédier, s’il dispose d’au moins trois mois de services continus.

Cependant, selon l’article 82.1 (3) de cette loi, un employeur peut congédier un salarié sans aucun préavis si ce dernier a commis une faute grave.

Faute grave : définition

La faute grave qui justifie un congédiement sans préavis est définie par les tribunaux comme un manquement grave et sérieux qui rend indispensable la rupture immédiate du lien d’emploi.

La faute grave est une violation sérieuse qui ne peut être excusée et elle entraîne un bris du lien de confiance entre l’employeur et le salarié.

Un comportement unique ou répété

Une faute grave vise généralement un manquement unique qui présente une gravité importante. Or, les tribunaux nous enseignent qu’il peut également s’agir d’un manquement qui, à première vue, ne constitue pas un manquement grave, mais qui en devient un parce que ce manquement est fait volontairement ou parce qu’il présente un caractère répétitif dans le temps.

En d’autres mots, la faute grave peut être un événement isolé d’une telle gravité qu’il justifie le congédiement sans préavis, ou encore, un comportement qui remplit le critère de gravité par son caractère répétitif et qui, malgré des avertissements reçus et des sanctions imposées, ne se résorbe pas.

Dans ce dernier cas, en l’absence de sanctions, des actes répétitifs ne sauraient généralement pas constituer une faute grave.

Une analyse subjective et non objective

La gravité de la faute commise par l’employé s’apprécie de manière subjective en fonction de chaque situation et non de manière objective.

Plusieurs facteurs doivent être considérés dans l’analyse subjective de la gravité de la faute commise : l’intention du salarié derrière la faute, les conséquences probables de son manquement, le comportement répréhensible, le dossier disciplinaire du salarié, etc.

Faute grave : exemples

Puisque la qualification de la norme repose sur une appréciation subjective du contexte et de la gravité de la faute commise, voyons quelques exemples de violations qui permettent à l’employeur de mettre fin, sans préavis, à l’emploi de son salarié.  

Les tribunaux considèrent généralement que les manquements suivants constituent une faute grave au sens de l’article 82.1 (3) de la Loi sur les normes du travail :

  • Vol ou fraude commis par l’employé dans l’exercice de ses fonctions;
  • Utilisation personnelle des biens de l’employeur mis à sa disposition en contravention à une politique interne à cet égard;
  • Appropriation de documents de l’employeur;
  • Vol, transfert ou sollicitation des clients de l’employeur chez un concurrent;
  • Tenue de propos racistes à l’endroit des membres du personnel;
  • Accumulation d’absentéisme sans justification;
  • Insubordination grave;
  • Atteinte à la dignité de collègues;
  • Fausses déclarations au moment de l’entrevue d’embauche;
  • Vol de temps;
  • Refus de se conformer aux directives de l’employeur;
  • Contravention à l’obligation de loyauté envers l’employeur.

Fardeau de preuve

Il appartient à l’employeur de justifier la rupture immédiate du lien d’emploi sans préavis.

Lorsqu’un congédiement sans préavis résulte d’une série de manquements répétés, l’employeur doit prouver qu’il y a eu une gradation des sanctions dans le dossier disciplinaire du salarié.

À l’inverse, si la faute est un manquement unique, l’employeur doit démontrer que le congédiement sans préavis est justifié dans les circonstances et il doit prouver la présence d’une faute grave. Le principe de gradation des sanctions ne s’applique pas si le salarié a commis une faute grave isolée.

La prépondérance de la preuve

Le fardeau de preuve de l’employeur est celui de la « prépondérance de la preuve ». Ainsi, l’employeur doit établir qu’il y a plus de chance que le salarié ait commis une faute grave que le contraire, selon le ratio 50 %+1.

L’employeur doit établir que la faute est grave au point de justifier le congédiement sans préavis. Selon le cas, il peut être pertinent de mener une enquête afin de démontrer que la faute reprochée au salarié a été commise par ce dernier.

Motif sérieux en droit du travail

Contrairement à la Loi sur les normes du travail, laquelle régit le congédiement immédiat en cas de faute grave d’un employé, l’article 2094 du Code civil du Québec prévoit un régime similaire, à l’effet que l’employeur peut résilier le contrat de travail, sans préavis, pour un motif sérieux.

Un motif sérieux doit être de nature à briser le lien de confiance entre l’employeur et l’employé et constituer, de manière objective, un geste ne pouvant être toléré, justifiant ainsi le congédiement immédiat.

Voici des exemples pouvant constituer un motif sérieux de congédiement sans préavis :

  • Insubordination;
  • Manque de loyauté;
  • Rendement insuffisant;
  • Erreurs répétées malgré plusieurs avertissements.

Par conséquent, la notion de « motif sérieux » prévue au Code civil du Québec présente un degré de similitude avec la notion de « faute grave » prévue à la Loi sur les normes du travail.

La notion de « motif sérieux » est cependant moins restrictive que celle de « faute grave ». Par exemple, les tribunaux ont jugé que le rendement insuffisant peut constituer un motif sérieux, sans toutefois constituer une faute grave qui permet à l’employeur de procéder à un congédiement sans préavis.

Contactez-nous dès maintenant

Lorsque la faute commise par un employé est suffisamment grave, l’employeur peut être libéré de son obligation de donner un préavis de fin d’emploi. Pour éviter des recours, il est donc crucial de déterminer si les raisons du congédiement constituent une faute grave fondant la résiliation unilatérale et sans préavis de son contrat de travail.

Afin de faciliter cette prise de décision, il est pertinent de consulter un avocat en droit du travail pour évaluer le contexte et la faute reprochée à l’employé. Les avocats en droit du travail de Verreau Dufresne Avocats pourront vous conseiller et vous assister.


Note : Les informations présentées ci-dessus sont d'ordre général et ne constituent pas des conseils juridiques. Afin d'obtenir un avis sur votre situation juridique particulière, n'hésitez pas à communiquer avec l’un de nos avocats de Québec, Lévis ou Montmagny.

Marie-Michelle Savard
Me Marie-Michelle Savard

Me Savard concentre sa pratique en litige civil, en droit du travail et de l’emploi ainsi qu'en droit administratif. Elle a également des habiletés en matière de droit de l'environnement et d'expropriation. Elle a conséquemment plaidé devant les instances judiciaires et administratives à de nombreuses occasions, devenant par le fait même une oratrice passionnée démontrant un fort sens de la persuasion.


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