Le droit des grands-parents de voir leurs petits-enfants

Me Jérôme Harrisson
Me Jérôme Harrisson

Me Jérôme Harrisson est avocat et pratique en droit de la famille, droit des personnes et droit de la jeunesse chez Verreau Dufresne Avocats.

Lorsque les parents se séparent, il est fréquent que le premier sujet abordé soit la garde de l’enfant. Malgré la séparation, les parents continuent d’exercer l’autorité parentale et ont tous les deux le droit de voir leur enfant.

Mais les parents ne sont pas les seules personnes à avoir des contacts avec leur enfant.  Le Code civil du Québec reconnaît que les grands-parents peuvent avoir des relations personnelles avec leur petit-enfant. Un grand-parent peut donc s’adresser au tribunal si l’un des deux parents l’empêche injustement de voir ou visiter son petit-enfant, par exemple, à la suite d’une dispute.

Dans cet article, nos avocats en droit de la famille vous présentent :

  • Les cas où un parent pourra valablement s’opposer aux contacts ou visites entre grands-parents et petits-enfants;
  • Les cas où le tribunal autorisera les contacts ou visites entre grands-parents et petits-enfants.

1. Le droit d’une relation entre l’enfant et ses grands-parents

Le Code civil du Québec prévoit que les relations entre un enfant et ses grands-parents peuvent être maintenues ou développées « dans la mesure où cela est dans l’intérêt de l’enfant ».

Il est important de souligner que ce droit appartient d’abord à l’enfant. Il s’agit également d’un droit pour les grands-parents, mais uniquement dans la mesure où les rapports ne peuvent qu’être mutuels. Ainsi, un grand-parent ne peut demander de voir sa petite-fille sous prétexte qu’il s’agit tout simplement « de son droit ». Il doit également démontrer qu’il en va de l’intérêt de sa petite-fille.

2. L’intérêt de l’enfant

En matière familiale, toute décision qui concerne la situation d’un enfant repose sur le principe de l’« intérêt de l’enfant » et le respect de ses droits. Les besoins moraux, affectifs et physiques de l’enfant sont pris en considération afin d’aider à déterminer ce qui est dans son intérêt. L’âge de l’enfant et le caractère de celui-ci sont des éléments à prendre en compte. La présence de violence familiale doit également être prise en considération.

Par exemple, le juge appelé à statuer sur la garde partagée ou exclusive de l’enfant doit analyser, selon la preuve administrée lors du procès, quel type de garde est dans son meilleur intérêt.

Déterminer si des contacts doivent avoir lieu entre un grand-parent et son petit-enfant ne fait pas exception au principe de l’« intérêt de l’enfant ».

3. Comment un grand-parent peut-il obtenir des accès auprès de son petit-enfant?

S’il n’y a pas d’entente avec le parent de l’enfant quant aux accès, le grand-parent devra déposer au tribunal une Demande en droits d’accès.

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en droits d’accès

Pour qu’un tribunal accorde à un grand-parent des droits d’accès auprès de son petit-enfant, le grand-parent doit démontrer au juge qu’il est dans l’intérêt de son petit-enfant de maintenir ou de développer une relation personnelle avec lui.

Que signifie-t-on par le « maintien ou le développement » d’une relation avec l’enfant? La Loi permet aux grands-parents qui ont déjà une relation établie avec leur petit-enfant de déposer une Demande en droits d’accès. C’est également le cas pour les grands-parents qui n’ont pas encore développé de relation avec leur petit-enfant.

Le juge analysera la preuve administrée lors du procès et décidera si une relation entre le grand-parent et le petit-enfant est souhaitable.

La Cour d’appel du Québec nous indique que les grands-parents n’ont pas à démontrer qu’ils sont des « tiers significatifs » dans la vie de l’enfant pour nécessairement se voir accorder des accès. On peut donc croire qu’un grand-parent qui voit son petit-enfant de manière sporadique pourrait se voir accorder des accès. Ce serait le cas d’un grand-parent qui, par exemple, réside à plusieurs heures de transport du domicile de l’enfant.

4. Les droits d’accès du grand-parent et leurs formes possibles

En droit, la notion de « droits d’accès » réfère aux contacts entre le parent non-gardien et l’enfant. Si un père détient la garde exclusive de son enfant, la mère est le parent non-gardien et ses contacts auprès de l’enfant, par exemple, une fin de semaine sur deux, sont ses « droits d’accès ». Pour de plus amples informations, nous vous invitons à consulter notre article sur les modalités de garde des enfants.

Par analogie, les mêmes termes (« droits d’accès ») sont utilisés pour les contacts entre les grands-parents et leur petit-enfant.

Puisque les grands-parents ne sont pas des substituts des parents, ceux-ci ne peuvent obtenir des droits d’accès aussi étendus qu’un parent.

Si les parents ne sont pas en mesure de s’entendre quant aux moments passés entre leur enfant et les grands-parents, la question peut être adressée au tribunal.

4.1 Lieu des accès

Les accès peuvent s’exercer à différents endroits, tels que la résidence des parents, la résidence du grand-parent, mais également dans des endroits publics (centre commercial, terrain de jeux, etc.).

La Loi reconnaît que le maintien ou le développement d’une relation entre un enfant et ses grands-parents ne requiert pas d’être en présence physique l’un de l’autre. Les accès pourraient donc être exercés non seulement en personne, mais aussi par visioconférence, par conversation téléphonique, par l’envoi de lettres ou par messages textes.

4.2 Fréquence des accès

La fréquence des droits d’accès peut également varier. Ceux-ci peuvent avoir lieu à des moments précis ou à déterminer, dépendamment de la relation entre les parents, les grands-parents et l’enfant.

Un juge pourrait, dans l’intérêt de l’enfant, accorder des droits d’accès à une grand-mère envers son petit-fils le troisième dimanche de chaque mois, de 10h00 à 16h00. D’un commun accord, un père séparé pourrait convenir avec son père (le grand-père de l’enfant) qu’il pourra voir sa petite-fille pendant un souper lors de ses droits d’accès d’une fin de semaine sur deux.

4.3 Planifier les accès

S’il y a entente, les accès peuvent être convenus par écrit entre les parents et les grands-parents. L’enfant de 14 ans et plus peut également convenir de ses accès directement avec ses grands-parents.

5. Lorsqu’il n’est pas dans l’intérêt du petit-enfant d’entretenir une relation avec son grand-parent

Les tribunaux ont identifié différentes situations où les contacts entre grands-parents et petits-enfants n’étaient pas dans l’intérêt de ces derniers. Toutefois, chaque situation s’évalue au cas par cas. Les exemples ci-dessous ne peuvent être généralisés. Afin d’obtenir une opinion juridique sur votre situation précise, n’hésitez pas à consulter nos avocats en droit familial.

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5.1 Exemples de situations

L’existence d’un conflit entre les parents et les grands-parents ne devrait pas systématiquement empêcher les contacts entre grands-parents et petits-enfants. En revanche, si le conflit est tel qu’il risque de causer des impacts négatifs sur l’enfant, il pourrait alors faire obstacle aux accès. L’intérêt de l’enfant requiert qu’il n’ait pas à « écoper psychologiquement des conséquences du climat de guerre, du climat qui existe entre les parents et les grands- parents ». Dans un jugement récent, la juge Marie-Hélène Dubé écrit : « La grand-mère doit comprendre qu’une réduction du conflit avec la mère est nécessaire pour permettre à [l’enfant] d’avoir de saines relations personnelles avec elle ».

D’autre part, le comportement d’un grand-parent peut également être un motif qui justifie de ne pas permettre des accès. C’est le cas d’un grand-parent qui ne cesse de dénigrer le parent d’un enfant. C’est également le cas d’un grand-parent qui adopte un comportement harcelant envers les parents et l’enfant.

Aussi, le passé criminel d’un grand-parent peut justifier de ne pas permettre des accès, ainsi que les problèmes de consommation d’alcool et/ou de drogue.

Enfin, les caractéristiques particulières d’un enfant peuvent également avoir un impact sur le maintien ou le développement de la relation. Dans un jugement daté de janvier 2023, le juge Robert Dufresne se penche sur le cas d’une enfant de 11 ans et demi ayant un diagnostic de trouble de l’adaptation (TDA) et de trouble du spectre de l’autisme (TSA), soit l’Asperger. L’enfant ne connaît pas beaucoup sa grand-mère et a eu peu de contacts avec celle-ci. Le juge écrit : « La preuve convainc le Tribunal de la grande fragilité de [l’enfant] face à tous les changements même d’apparence anodine. Il ne paraît pas dans l’intérêt de [l’enfant] de développer une nouvelle relation avec une personne qui lui est pratiquement inconnue, même s’il s’agit de sa grand-mère maternelle ».

5.2  Le désir de l’enfant

Le désir de l’enfant peut faire obstacle au maintien ou au développement de la relation entre un grand-parent et l’enfant. L’article 611 Code civil du Québec prévoit des régimes différents en fonction de l’âge de l’enfant. Le tableau ci-dessous en résume les principes :

Enfant âgé de moins de 10 ansLes accès d’un enfant de moins de 10 ans sont déterminés en fonction de son intérêt, et ce, peu importe si l’enfant verbalise qu’il veut voir ses grands-parents ou non.  
Enfant âgé entre 10 ans et 13 ansLes grands-parents peuvent avoir des accès auprès de leur petit-enfant âgé entre 10 et 13 ans si :
– Le petit-enfant y consent;
– Ou, si le petit-enfant n’y consent pas, que le tribunal a accordé une telle autorisation aux grands-parents. L’intérêt de l’enfant et les raisons de son refus seront des éléments pris en considération par le tribunal.
Enfant âgé de 14 ans et plusLorsque l’enfant est âgé de 14 et plus, son consentement est absolument nécessaire pour l’exercice des droits d’accès des grands-parents.
C’est donc dire qu’à partir de 14 ans, l’adolescent peut, à son entière discrétion, mettre fin à sa relation avec ses grands-parents s’il le souhaite.

Contactez nos avocats en droit de la famille

Nos avocats interviennent fréquemment en cas de désaccord entre parents et grands-parents quant aux droits d’accès de ces derniers auprès des petits-enfants. Ils seront en mesure de :

  • Analyser votre situation et émettre une opinion juridique concernant vos droits et vos obligations;
  • Vous informer des possibilités qui s’offrent à vous pour régler le conflit (lettre de mise en demeure, négociation, recours au tribunal, etc.);
  • Si vous êtes un grand-parent, rédiger votre demande en droits d’accès et la déposer au tribunal ;
  • Si vous êtes un parent et avez reçu une demande en droits d’accès injustifiée / contraire à l’intérêt de votre enfant, contester cette demande;
  • Élaborer une stratégie et préparer vos arguments en vue d’une audience devant le tribunal;
  • Préparer votre preuve en vue d’une audience devant le tribunal : 
    • En sélectionnant pour vous les documents nécessaires pour convaincre le tribunal de votre position;
    • En sélectionnant pour vous les témoins nécessaires à votre cause et en les préparant en vue de l’audience;
  • Vous représenter devant le tribunal dans le cadre d’une demande en droits d’accès;
  • Négocier une entente à l’amiable en vue de résoudre un tel litige.
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Note : Les informations présentées ci-dessus sont d'ordre général et ne constituent pas des conseils juridiques. Afin d'obtenir un avis sur votre situation juridique particulière, n'hésitez pas à communiquer avec l’un de nos avocats de Québec, Lévis ou Montmagny.

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Me Jérôme Harrisson est avocat et pratique en droit de la famille, droit des personnes et droit de la jeunesse chez Verreau Dufresne Avocats.


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